"Qu'ont en commun les pays ayant les meilleures réponses aux coronavirus ? Des femmes dirigeantes"
Avivah Wittenberg-Cox (Forbes, Avril 2020)
Si on recherche des exemples de leadership exemplaires, regardons du côté des pays dirigés par des femmes, suggère Avivah Wittenberg-Cox dans le magazine FORBES. À la tête de Taïwan, de la Norvège, de la Nouvelle-Zélande, de la Finlande, de l'Islande du Danemark et de l'Allemagne, les femmes au pouvoir se sont mobilisées avec brio pour gérer la crise, avec un nombre de décès liés au covid-19 (à la date du 15 mai 2020) largement inférieur à leurs voisins, selon le European Center for Disease Prevention and Control: Taïwan: 7 mort(e)s, Norvège: 229 mort(e)s, Nouvelle-Zélande: 21 mort(e)s, Finlande: 284 mort(e)s, Iceland: 10 mort(e)s, Danemark: 533 mort(e)s, Allemagne: 7723 mort(e)s.
Alors qui sont ces femmes au pouvoir, souvent féministes et engagées, qui nous ont montré la voie en ce temps de crise sanitaire?
1. Tsai Ing-Wen à Taïwan
"J'espère qu'un jour tout le monde m'appellera président, et non pas femme présidente. Le genre ne devrait pas être la base du jugement de la performance d'une personne".
Tsai Ing-Wen, 2019
Tsai Ing-Wen (1956-) est la Présidente de la République de Chine (Taïwan) depuis 2016. Récemment réélue pour un second mandat de 4 ans au suffrage universel avec 57,1% des voix, elle a bravé l'intensité de la campagne misogyne de ses opposant(e)s qui lui reprochent d'être une femme non mariée et sans enfants. Première femme Présidente de Taïwan et première femme dirigeante d'Asie non héritière, elle tire les rênes du pouvoir d'une main de maîtresse, défendant ardemment les valeurs de la démocratie à l'occidentale, au grand désarroi de Xi Jinping.
Féministe à sa manière, Tsai Ing-Wen milite pour libérer les femmes des soins aux personnes âgées, à travers son plan de soins de longue durée 2.0. L'objectif ? Stimuler l'indépendance économique des femmes. Elle tend aussi à protéger les femmes des violences domestiques en prônant une protection légale plus adaptée.
Quant au coronavirus, la réponse Taïwanaise a été des plus efficaces, et ce dès le premier cas de covid-19 sur le territoire. Dès Janvier, le pouvoir politique a introduit 124 mesures pour limiter la propagation du virus. Taïwan a ainsi réussi à garder l'épidémie sous contrôle, sans avoir recours aux méthodes de confinement radicales popularisées en Europe.
2. Jacinda Ardern en Nouvelle-Zélande
"C'est à une femme de décider du moment où elle choisit d'avoir des enfants, et cela ne doit pas prédéterminer si on lui donne ou non un emploi ou si elle a des possibilités d'emploi".
Jacinda Ardern, 2018
En octobre 2017 à l'âge de 37 ans, Jacinda Ardern devient la plus jeune Première ministre du pays depuis plus de 150 ans.
Affichant des opinions ouvertement féministes, elle incarne une nouvelle manière de faire de la politique, plus pragmatique et humaine. Sa communication politique innovante se démarque notamment au lendemain des attentats de Christchurch à l'encontre de la communauté musulmane, suite auxquels la ministre a fait preuve d'une empathie et d'une détermination sans bornes. Vêtue d'un foulard noir, elle est directement allée à la rencontre des victimes pour les accueillir dans ses bras. Sa réponse politique marquée par la compassion, la tendresse et la détermination fut saluée par les médias du monde entier.
Enceinte en 2018 pendant son mandat, elle devient ainsi la deuxième femme de l'histoire à accoucher alors qu'elle est cheffe d'État élue et déchaîne les critiques misogynes. Elle devient, par la même occasion, la première cheffe d'État élue à prendre un congé maternité.
Faisant face au coronavirus, la Première ministre baisse son salaire et celui de ses ministres de 20% pendant six mois, par solidarité nationale. Une nouvelle fois saluée par les médias internationaux, sa réponse à la crise est qualifiée d'exemplaire, avec une stratégie de confinement claire et efficace, reposant sur la responsabilité personnelle des citoyen(ne)s. Elle s'est aussi adressée aux enfants de la nation, les prévenant que le lapin de Pâques pourrait ne pas passer cette année.
3. Sanna Marin en Finlande
"We all have to fight each and everyday for equality"
Sanna Marin
À 34 ans, Sanna Marin est la plus jeune Première ministre du monde depuis 2019, vice Présidente du Parti social-démocrate de Finlande. À la tête d'une coalition de femmes, elle représente la jeunesse nordique progressiste, libérale et écologiste.
A l'occasion du Forum Mondial de l'Économie (2020), elle identifie l'attention globale des médias sur son âge et son genre comme symptomatique du sexisme qui sévit dans nos sociétés contemporaines: être une jeune femme au pouvoir devrait être la norme, insiste-t-elle. Consciente des inégalités entre les genres, elle insiste sur le fait que le féminisme est aussi une affaire d'hommes, et que la parité doit être un combat de tous les jours.
Sa gestion du covid-19 a étonné la communauté internationale, en mettant en oeuvre des processus de communication modernes - notamment en utilisant les influenceuses.eurs pour diffuser des directives - et en toute sérénité. Le journaliste reporter Eddy Hawkins commente sa gestion du coronavirus en affirmant: "Sa performance lors des conférences de presse et au Parlement a été ce qui a le mieux fonctionné pour les Finlandais - claire, concise, sans émotion, mais avec une nuance de réconfort".
4. Katrín Jakobsdóttir en Islande
"Beaucoup de femmes politiques en Islande ne seraient jamais arrivées là où nous sommes aujourd'hui sans les services de garde d'enfants et le congé parental. Je suis un excellent exemple de cela".
Katrín Jakobsdóttir
Écologiste, féministe et anti-militariste, Katrín Jakobsdóttir est la Première Ministre d'Islande depuis novembre 2017. Elle est l'unique cheffe d'État écologiste au monde, et a fait de l'égalité entre les genres - et donc du féminisme ! - l'une des priorités de son mandat.
Engagée pour les droits des femmes, elle s'empare de la déferlante #metoo en organisant un congrès international dédié à la reconnaissance publique des violences sexistes et sexuelles du monde entier entre le 17 et le 19 septembre 2019.
Réunissant le peuple islandais autour du credo "l'union dans la difficulté", sa gestion du covid-19 est considérée comme un modèle à suivre, notamment au regarde de la rapidité de réponse publique. En mettant promptement en place une campagne de dépistage généralisé gratuite pour tou.te.s, elle a évité un confinement global et gardé la pandémie sous contrôle au sein du pays.
5. Erna Solberg en Norvège
"Lorsque vous investissez dans l'éducation d'une fille, elle se nourrit elle-même, ses enfants, sa communauté et sa nation"
Erna Solberg, 2014
Photo via Maroc Diplomatique
Première ministre de la Norvège depuis 2013, Erna Solberg a été cheffe adjointe du Parti conservateur de 2002 à 2004 et, en 2004, avant de devenir cheffe du parti.
Également à la tête de l'Association nationale des femmes conservatrices, de 1994 à 1998, elle a accueilli la conférence des donateurs de la Facilité de financement mondiale pour la santé des femmes et des enfants à Oslo en novembre 2018. Elle est fermement convaincue que l'investissement dans l'éducation des femmes est clé pour atteindre les objectifs de développement durable.
Surnommée la "Merkel Norvégienne", elle a géré la crise du coronavirus en adaptant très tôt un confinement ambitieux généralisé. Dans une optique d'innovation de leadership, Erna Solberg s'est faite remarquée par la presse en s'adressant directement aux enfants de la nation lors d'une conférence de presse réservée uniquement à celles/ceux-ci. L'objectif? Les rassurer face à la pandémie en répondant à leurs questions pendant près d'une heure.